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11/17/2024

LA HEM ET SYPHON

Au bord de la Hem, un panneau « révèle un problème connu de tous »… ce qui passe mal  

C’est l’histoire d’un panneau qui dit tout sur le parcours ubuesque de la Hem.  La rivière parle à la première personne, non sans humour, de son détour à contre-courant  dans le canal de Calais. Mais dans la vallée de la Hem, ça ne fait rire personne. 
 
Audruicq.
Un panneau planté dans les herbes hautes, à quelques encablures de l’écluse d’Hennuin à Audruicq, peut sembler anodin à bien des égards. Mais il ne l’est pas. Il raconte l’absurde, le chemin tortueux de la Hem, un affluent de l’Aa. Sur l’écriteau, la rivière y évoque à la première personne son périple vers la mer.
Ce panneau révèle un problème connu  de tous, on le met sous nos yeux et on décide pourtant de laisser  les choses comme ça. 
« ne l’auraient-ils
pas un peu cherché ? »
« Ce sont les hommes qui ont la tête à l’envers (…) Impossible de rejoindre directement la mer. Depuis je remonte le canal à contre-courant, en face de vous. Pendant trois kilomètres ! Que voulez-vous ? À présent, j’embête parfois les hommes. Je sors de mon lit. Ne trouvez-vous pas qu’ils l’ont un peu cherché ? »
Jusqu’à la fin des années 80, la Hem passait dans un siphon sous le canal de Calais pour alimenter le Mardyck, qui rejoignait l’Aa à Saint-Folquin, et se jetait à la mer. Mais en 1989, lors de l’agrandissement du canal de Calais et la construction de l’écluse d’Hennuin, « ils ont cassé mon siphon, ils ne l’ont pas reconstruit ! », dit le panneau. Depuis, la Hem fait un détour de l’écluse d’Hennuin et remonte à rebours le canal de Calais avant de rejoindre l’Aa à Ruminghem pour s’écouler gravitairement jusqu’à Gravelines.
Selon les Voies navigables de France (VNF), « le siphon n’a pas été cassé, il était l’objet d’envasement, précise Gilles Ryckebusch, directeur territorial Nord et Pas-de-Calais. Des études montraient à ce moment-là que la meilleure façon de sécuriser l’écoulement de l’eau c’était un aménagement en rebroussement. C’était à l’époque la moins mauvaise solution. »
Un humour qui ne passe pas
Dans le bassin-versant de la Hem, on rit jaune. « Ce panneau révèle un problème connu de tous, on le met sous nos yeux et on décide pourtant de laisser les choses comme ça. C’est une forme de provocation, trouve Allan Turpin, président de Stop inondations et maire d’Andres. Et le panneau le dit avec humour en plus. »
À Recques-sur-Hem, village régulièrement inondé, un tiers des maisons ont été touchées il y a un an lors de ces crues centennales, c’est la deuxième commune la plus touchée après Blendecques.
Le maire Gérard Louguet n’a donc pas tellement envie de rire. « La longueur du chemin qu’on fait prendre à la Hem, à contre-courant, freine l’écoulement de l’eau et son évacuation à la mer, regrette-t-il. Le canal va en descendant et la Hem doit remonter pour aller dans l’Aa. »
Arnaud Gauthier, hydrogéologue et professeur à l’université de Lille, travaille sur une étude concernant les inondations qui touchent régulièrement Recques-sur-Hem, située comme Polincove à l’aval du bassin-versant, dans une sorte d’entonnoir. Selon lui, le flux de la rivière qui remonte à contre-courant, « s’oppose au flux naturel de l’eau. C’est un frein hydraulique. Et donc un facteur aggravant pour ces communes. » En raison de la topographie de la commune, « l’écoulement de l’eau est déjà très faible, signale Arnaud Gauthier et donc si vous adjoignez l’écoulement lent lié à la perte du siphon, quand il y a un flux d’eau trop important, le surplus se répand dans les champs et les maisons. »
La question du siphon doit s’ancrer dans une vue d’ensemble selon VNF, « ce sujet sera remis sur la table quand on aura avancé sur le reste, souligne Olivier Matrat. Il y a énormément de points où il faut apporter davantage de sécurité. On a vécu un événement exceptionnel, qui arrive tous les 200 ans. Ce n’est pas encore identifié comme une priorité par rapport à tout ce qu’il y a à faire. »